De la prison au changement : Prévenir la récidive et promouvoir l’insertion socio-économique des détenus

Le Mali compte 59 établissements pénitentiaires dont 52 maisons d’arrêt et de correction, 1 maison centrale d’arrêt, 2 centres spécialisés pour les femmes et pour les mineurs et 4 pénitenciers agricoles.

20 novembre 2020

Formation au métier agricole dans un centre de détention / Photo : @PNUD Mali

Doté d'un budget très limité (5.254.452 Francs CFA, moins de 10 000 USD en 2018), le système pénitentiaire malien est confronté à de nombreux défis tels que la vétusté des infrastructures, la surpopulation carcérale, l'absence de séparation catégorielle des détenus, l'imperfection des dispositifs sécuritaires, une formation insuffisante du personnel par rapport aux besoins d'un système pénitentiaire moderne. On peut aussi relever des cas de dépassement des délais de détention et un manque de politique de réinsertion efficace.

Les infrastructures pénitentiaires étaient déjà dans un état déplorable au début de la crise. Exacerbant la situation, les prisons des régions du Nord du Mali ont fait partie en 2012 et 2013 des premières cibles des groupes armés qui ont des mises à sac et pillées.

La Direction nationale de l'administration pénitentiaire et de l'éducation surveillée (DNAPES) du ministère de la Justice et des Droits de l'Homme dispose d'environ sept cents (700) agents pénitentiaires toutes catégories et profils confondus qui doivent faire face à une population carcérale d'environ 6000 personnes dans l'ensemble du pays.

La récidive n'est pas la seule cause de la surpopulation carcérale mais elle y contribue certainement. Dans le contexte malien, la précarité de la vie est la source de la plupart des infractions qui conduisent aux emprisonnements. L'absence d'une politique de réinsertion sociale entraîne l'augmentation du taux de récidive.

Quand le délinquant n'est pas mieux préparé (sur le plan social, économique et psychologique) à sa sortie de prison, le detenu est laissé pour compte. Aucun changement de positif n'étant intervenu dans sa vie pendant sa détention, il rentre en conflit avec la loi.

 il risque d'y retourner pour le même délit ou une infraction plus grave.  

Aussi la criminalité gagne du terrain avec la pauvreté, le développement des villes, les nouvelles technologies, la recherche du gain facile…

Les règles de Mandela sont explicites sur ce point : « Les objectifs des peines d'emprisonnement et les mesures similaires privées de l'individu de sa liberté sont principalement de protéger la société contre le crime et de voir les récidives. Ces objectifs ne sauraient être atteints que si la période de privation de liberté est mise à profit pour obtenir, dans toute la mesure possible, la réinsertion de ces individus dans la société après leur libération, afin qu'ils puissent vivre dans le respect de la loi et subvenir à leurs besoins ».

À cette fin, les administrations pénitentiaires et les autres autorités doivent donner aux détenus la possibilité de recevoir une instruction et une formation professionnelle et de travailler, et leur offrir toutes les autres formes d'assistance qui sont adaptées et disponibles, y compris des moyens curatifs , moraux, spirituels, sociaux, sanitaires et sportifs. Tous les programmes, activités et services doivent être mis en œuvre conformément aux besoins du traitement individuel des détenus.

La lutte contre la récidive figure parmi les priorités du projet GFP prisons Mandela, mis en œuvre par le PNUD et la MINUSMA et financé par le Royaume des Pays-Bas depuis 2017. Le projet a assuré la mise en place de microprojets visant à rendre opérationnel des ateliers de production et de formation professionnelle détenus dans 10 établissements pénitentiaires, 22 autres établissements supplémentaires pourront bénéficier d'activités de formations professionnelles et de microprojets. Un appui spécifique en outre été fourni aux 4 pénitenciers agricoles afin de permettre à des détenus en fin de peine d'apprendre un nouveau métier et de se préparer à la sortie. à un accroissement de la production de céréales de 9,71 tonnes avant le projet à 49,3 tonnes en 2019. Enfin, le projet est en ouvre en train d ' Appuyer la DNAPES dans la définition d'une politique nationale de réinsertion sociale afin d'assurer la pérennisation de ces actions. Récemment, des cas de réinsertions réussies de détenus par l'emploi ont été enregistrés à Kita et à Koutiala et des leçons tirées de ces meilleures pratiques seront étendues à d'autres maisons d'arrêt.

A ce jour ce projet a déjà inscrit à son actif plusieurs réalisations notamment telles que l'installation du système informatisé de gestion des détenus dans 24 maisons d'arrêts du portefeuille du projet, ce qui va accélérer la gestion des détenus et la réduction du délai de dépassement des détentions provisoires; la formation de 176 Agents pénitenciers en gestion et 430 aux règles Nelson Mandela; la distribution régulière des kits de dignité à toutes les femmes détenues et des kits composés de nourritures, d'habillements et de jouets aux nourrisons accompagnant leurs mères en détention ; la distribution des lettres à 3197 détenus et la dotation de 26 maisons d'arrêts en équipements sportifs.


Auteur : Tsagao Traoré

Spécilaiste de programme, conseiller technique principal du Projet GFP Prisons Mandela / PNUD Mali